UNIVERSITE DE LA FONDATION ARISTIDE

Présentation, Février 2010

Par Fritz Dorziair

L’Université de la Fondation Aristide (Unifa) est une institution à but non lucrative. Elle fait partie des œuvres de la Fondation dénommée Fondation Aristide dont le fondateur le Dr Jean Bertrand Aristide donnant naissance le 8 Mars 1996 a cette gigantesque entreprise humaine dont l’objectif stratégique fondamental est de faire participer Haïti à l’enrichissement de l’universel. Ainsi, l UNIFA est la dernière en date des institutions sœurs créées par la Fondation Aristide. Fondée le 14 février 2001 et reconnue légalement par le Ministère de l’Education Nationale, elle est sans affiliation politique et idéologique. Elle vise la recherche de la vérité et la promotion de l’humain (Statuts, art.3). Comme toute Institution d’Enseignement Supérieur, l’Unifa intervient plus particulièrement dans :

* le développement de curricula et la transmission de savoir et savoir-faire propres à susciter l’épanouissement de ses étudiants et le progrès des communautés nationales;

* l’animation des débats d’idées favorisant une meilleure conscience critique

* la mise en œuvre d’activités de recherche scientifique non seulement pour appuyer l’enseignement dispensé mais pour aider à répondre aux besoins identifiés et à trouver des solutions aux problèmes d’actualité

Forte de cette mission à la fois académique et citoyenne, l’Unifa comptait dès sa mise en place un effectif de 125 étudiants recrutés à l’échelle nationale sur la base d’une rigoureuse représentation départementale. La Direction de l’Unifa avait dès le départ imposé ce critère de sélection comme une exigence d’équité sociale en vue de promouvoir l’intégration de toutes les couches de la population et l’accès de celles-ci à la formation académique.

L’Unifa misait sur une série de cinq (5) facultés comme champs d’études et de recherche: les Sciences de la santé, l’Education, le Droit, la Communication et l’environnement. Les retards accumulés dans la recherche des moyens financiers et l’identification des ressources humaines, notamment des professeurs qualifiés et expérimentés ont reculé le lancement officiel des cours au moment de l’ouverture, en octobre 2000, de la nouvelle année académique. Les membres fondateurs et la nouvelle direction ont donc décidé de mettre en route la faculté des Sciences de la santé. Celle-ci s’inscrivait dans le cadre d’une coopération fructueuse entre l’Unifa et la Faculté de Médecine de Santiago de Cuba. Les aspects académiques étant réglés de la coopération (la partie cubaine acceptait de fournir le corps professoral), les 125 jeunes bacheliers débutaient leurs études de médecine après une courte période de trois mois de cours intensif d’espagnol.

Conformément à l’esprit et la lettre de sa constitution, l’Unifia ne réclamait aucun frais aux nouveaux étudiants. Outre le programme de bourse complète dont ils bénéficiaient tous, les étudiants avaient à leur disposition un parc de bus qui assurait le transport d’un point préalablement fixé de leurs zones d’habitation jusqu’au local de l’Université dont le siège se trouvait temporairement au local de la Fondation Aristide, à Tabarre. Parallèlement, un restaurant universitaire garantissait gratuitement et régulièrement une fois par jour un plat chaud à chaque étudiant.

Le Règlement interne et le Règlement académique en vigueur à l’Université permettaient à celle-ci de fonctionner dans l’ordre et la discipline. A la fin de la première année, les premiers résultats académiques sont excellents pour la grande majorité des 125 étudiants immatriculés. Parallèlement ont débuté dans la localité de Caradeux, à Tabarre, les travaux de construction du campus universitaire destiné à loger définitivement la faculté des Sciences de la santé, certes, mais aussi les autres facultés et sous-structures y afférentes (bibliothèques, résidence pour professeurs étudiants, parc sportif, etc) .

En octobre 2002, une deuxième promotion d’étudiants est recrutée sur la base de l’équité de genre et la représentation départementale. Au total, 66 nouveaux étudiants prenaient place en première année de médecine. Les conditions administratives sont les mêmes pour cette promotion comme pour la première. En 2003, à la fin de la première phase des travaux de construction du campus, l’Université déménage et s’installe définitivement dans ses nouveaux locaux. Ce déménagement permettait d’augurer avec optimisme le projet d’extension de l’Université. Du reste, les demandes d’inscription venant de jeunes bacheliers dont la plupart venant de couches les plus défavorisées de la population ne cessaient d’augmenter. A ce stade, l’on pouvait considérer comme acquise la consolidation de cette phase d’implantation de l’Unifa tellement ces deux premières années tant sur le plan académique que sur le plan institutionnel avaient donné les résultats escomptés. La qualité de ces résultats est due pour l’essentiel à la qualité du corps professoral hautement qualifié et longuement expérimenté, certes, mais aussi à la fidélité des responsables quant à la vision stratégique centrale du projet et son appropriation par le corps estudiantin.

En octobre 2003, alors que les turbulences politiques secouent en particulier la ‘’République’’ de Port-au-Prince, perturbant les activités scolaires et universitaires, une troisième promotion d’étudiants intègre l’Unifa. La faculté des Sciences de la santé compte alors au total 247 étudiants.

Entre temps, le nouvel hôpital universitaire situé à Delmas 33, Hôpital de la Paix, est fonctionnel suite à une cérémonie d’inauguration dont l’invité d’honneur était le Président en exercice Excellence, Jean Bertrand Aristide. Avaient participé aussi des représentants de l’Etat cubain, lequel avait fourni l’essentiel du matériel technique et logistique équipant l’Hôpital. Il faut souligner qu’au passage que cette cérémonie a lieu dans la foulée d’une bataille politique radicale pour le pouvoir. Le contexte social et le climat politique ont pollué l’environnement et quasiment toutes les activités économiques, administrative et même la vie tout court du pays. Les étudiants de troisième année de médecine de l’Unifa devaient entreprendre leur stage à l’Hôpital de la Paix pour marquer la fin de la première étape de leurs études en médecine, mais l’environnement sécuritaire et la bataille politique les en ont empêchés.

Au départ forcé du Président Aristide en exil le 29 février 2004, l’Unifa paie un lourd tribut. D’abord vandalisée et totalement pillée, elle est par la suite occupée pendant plus de trois ans par les forces de la composante militaire de la Minustah (Mission de Stabilisation des Nations Unies) dépêchée en Haïti suite aux événements du 29 février 2004. Pendant les trois ans d’occupation, nul responsable de l’Unifa ne pouvait s’approcher des locaux. La soldatesque en avait fait sa propriété privée de fait. Il n’y a pas eu non plus de voix académiques locales, ni même de responsables politiques si ce n’est ceux du parti lavalas à protester et à réclamer le départ des soldats du campus.

Au lendemain du 29 février 2004, les 247 étudiants de l’Unifa se sont retrouvés dans la rue, dépossédés de leur université. A quelques rares exceptions près, ils (les étudiants) s’étaient tenus à l’écart de l’arène politique locale, observant du lieu de leur jeunesse encore candide le misérabilisme politique et moral de la société haïtienne. Certes, les étudiants avaient pleinement conscience qu’ils n’auraient sans doute pas pu entreprendre des études de médecine si ce n’était la mise en place de l’Unifa, car la faculté de médecine de l’Université d’Etat d’Haïti n’admettait sur concours que 100 étudiants par année et que de ce ‘’numerus clausus’’ leurs chances de décrocher une place équivalait à la portion congrue. De plus, vue de l’extérieur, ils étaient perçus comme étant des novices au noviciat politique dont était taxée à tort l’Unifa. Une chose est certaine, c’est qu’à l’interne aucun étudiant de l’Unifa était obligé de prendre part à une manifestation politique pour ou contre. Les séances de conférences-débats thématiques auxquelles ils avaient pu assister dans le cadre de leurs éludes de médecine s’inscrivaient dans le programme d’éducation à la citoyenneté consubstantiel du sens du service à la communauté. Ce programme est par essence un des critères définitoires des objectifs et de la mission de toute institution universitaire. Celle-ci n’est pas une fin en soi, mais un lieu d’enseignement, de formation, de recherche, certes, mais au service de la communauté.

Comme le veut la tradition en Haïti, chaque chute brutale de régime s’accompagne d’opérations de ‘’dechoukaj’’. Ainsi, des institutions publiques et/ou privées soumises au ‘’dechoukaj’’ du 29 février 2004, l’Unifa fut la seule et unique institution universitaire à l’avoir été. La raison, on la connait.

Les responsables, pour leur part, n’avaient pas d’autre choix que le maquis ou l’exil. Nous pensions et rêvions tous d’une grande Unifa et surtout nous pensions à la première promotion de médecins issus de l’Unifa. Le pays avait et toujours besoin de professionnels de la santé. Aujourd’hui, notre pays ne compte que 2.5 médecins pour 10.000 habitants. Si les choses ne s’étaient pas passées comme elles le sont, l’Unifa aurait à date gradué au moins trois promotions de médecins.

Grâce à la générosité de l’Etat cubain et la vision de ses dirigeants, 246 des 247 étudiants de l’Unifa ont été accueilli à Cuba. Ils ont pu poursuivre et achever leurs études à la faculté de médicine de Santiago. Les démarches devant aboutir à cette issue n’ont pas pourtant été si faciles, en raison notamment des tracasseries administratives et sans doute de leur couleur politique apparente sous un régime politique engagé à grande vitesse à l’extrême droite.

Bien que décapitée et dispersée, la direction de l’Unifa cherchait à cultiver le contact avec les étudiants installés à Cuba même si sur place en Haïti elle n’avait aucun moyen politique, diplomatique ou économique pour aider les étudiants dans leurs démarches à poursuivre leurs études à Cuba. Le contact est tout même maintenu et le 02 août 2008, 123 étudiants de la première promotion de l’Unifa (promotion février 2001) ont été gradués en compagnie de 53 autres étudiants boursiers de l’Etat haïtien. Le gouvernement haïtien présidé par l’Agr. René Garcia Préval se faisait représenter à la cérémonie de graduation par le Directeur Général du ministère de la Santé Publique et de la Population et 4 autres membres de ce même ministère. D’un autre coté, une délégation de la Fondation Aristide pour la Démocratie composée de 4 membres présidée par le Directeur Toussaint Hilaire, Fritz Dorziair de l’Unifa, Dr Maryse Narcisse et Max Buteau avaient pris part à la cérémonie de graduation, laquelle avaient été également celle de plusieurs centaines d’autres nouveaux médecins cubains et étrangers.

La Fondation Aristide ne s’est pas contentée de sa participation à la cérémonie de graduation à Cuba. Voulant rehausser et exprimer sa fierté à l’égard des nouveaux médecins, elle a organisé, le 14 novembre 2008, en leur honneur et à la dimension de l’événement une fête à laquelle étaient conviés des membres des familles des nouveaux médecins, mais aussi des membres de la Fondation Aristide, des responsables de l’Unifa, d’anciens ministres et d’anciens parlementaires , de médecins, etc.

Le 14 août 2009, 54 nouveaux médecins issus de l’Unifa ajoutés aux 6 autres boursiers de l’Etat haïtien ont été gradués. La cérémonie de graduation, cette fois, s’est déroulée en Haïti, à Port-au-Prince en présence des membres des familles des nouveaux médecins, des représentants de l’Etat haïtien, des autorités académiques cubaines des représentants de l’université de la Fondation Aristide Toussaint Hilaire et Fritz Dorziair. Ces nouveaux médecins effectuent actuellement leur service social dans différents départements sanitaires du pays, tel que planifié par le Ministère de la Santé Publique et de la Population(MSPP).

Pour l’heure, 62 étudiants finissants en médecine, tous issus de la troisième promotion d’étudiants de l’Unifa effectuent leur internat en Haïti (Stage pratique de courte durée en dernière année de médecine et qui aboutit à l’examen final). S’ils réussissent tous cette ultime épreuve, ils seront gradués en août prochain.

La population haïtienne bénéficie déjà du savoir et du savoir-faire des nouveaux médecins. Lors des inondations de l’année 2009 aux Gonaïves, à Cabaret et à Montrouis, les médecins ont participé à des opérations de secours et d’assistance médicale, soit dans le cadre du programme de secours officiel mis en place par le MSPP, soit dans le cadre des actions entreprises par la Fondation Aristide. Les médecins ont participé à au moins trois cliniques mobiles organisées en 2008 et 2009 par la Fondation Aristide (Port-au-Prince, Léogane, Saut d’eau). Certains des médecins projettent d’organiser des cliniques mobiles dans des communes où ils ont effectué leur service social. Ils ont déjà soumis à la Fondation Aristide des demandes de soutien, soit financier ou en médicaments.

Suite au tremblement de terre du 12 janvier 2010, plusieurs médecins issus de l’Unifa ont intégré l’équipe médicale l’ONG de Zanmi Lasante et portent secours et assistance médicale aux personnes blessées de Léogane, Petit-Goave et dans diverses zones de la région métropolitaine de Port-au-Prince.

L’Unifa a repris ses activités le 04 mai 2009 dans le cadre d’un Institut de Langues qui comptait avant le tremblement de terre 296 étudiants. Parallèlement, l’Unifa s’apprêtait à mettre en place deux nouvelles entités : une Faculté des Sciences et d’Architecture (FASA) et un Institut des Nouvelles technologies et d’Informatique(INTI). Tous les préalables techniques, budgétaires, académiques et logistiques étaient en place pour lancer dès le 1er février 2010 l’Institut des Nouvelles Technologies et d’Informatique (INTI).

Quant au local de l’Unifa, il a subi des fissures profondes causées par la violence du tremblement de terre. Les responsables entreprennent pour l’heure des démarches en vue de le soumettre à une évaluation technique complète avant la reprise des cours.

Février 2010

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